La conférence « Se dirige-t-on vers un tourisme de proximité par la contrainte ? » se déroulait dans le cadre du Salon Horizonia, qui s’est tenu du 13 au 15 septembre 2022 à Lyon. Les interventions ont ciblé les grandes données de la mobilité longue distance en France (avec Béatrice Jarrige) et les solutions concrètes pour rendre possible et valoriser le tourisme de proximité (avec Marie Sturm).
Pour introduire le sujet, Guillaume Cromer, animateur des échanges pour le réseau des Acteurs du Tourisme Durable (ATD), partenaire du salon, a rappelé le poids du transport dans le Bilan Carbone du tourisme en France : 40%. Une bonne raison de traiter la problématique de la mobilité et d’y consacrer une conférence lors de cet événement dédié aux professionnels du tourisme durable.
S’appuyer sur des données chiffrées pour prioriser les actions
Béatrice Jarrige, chef de projet sur le volet Mobilité de longue distance du Plan de transformation de l’économie française (PTEF) pour le Shift Project, nous propose une analyse des données disponibles sur le sujet. La mobilité longue distance est définie comme la mobilité qui éloigne à plus de 80km à vol d’oiseau du domicile, ou 100 km de distance routière. L’association The Shift Project s’appuie sur des données chiffrées pour mener un travail de fond. Elle porte également une mission de lobbying auprès du grand public, des entreprises et des décideurs.
Quelques chiffres clés ont été présentés, permettant ainsi de donner des ordres de grandeur, afin notamment de définir des priorités d’action. Rappelons que les données relatives à la mobilité longue distance des Français ne comprennent pas les déplacements des touristes étrangers en France. Sur la base de données datant de fin 2021, on apprend qu’un Français parcourt en moyenne 6300 km par an. La mobilité constitue le premier poste d’émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le Bilan Carbone d’un Français. Les déplacements longue distance peuvent être répartis par motif : 20% pour les déplacements professionnels, 23% pour la visite de la famille et des amis, ou encore 26% pour les vacances. La part du déplacement pour motif de vacances grimpe à 42% si l’on tient compte des kilomètres parcourus et non du nombre de déplacements. L’analyse des déplacements par mode de transport place la voiture sur la première marche du podium en nombre de voyages. En kilomètres parcourus par personne, la voiture arrive par contre à égalité avec l’avion, avec 43% pour chacun de ces modes, quand le train compte pour 12% des kilomètres parcourus et le bateau pour 0,5%.
Il est intéressant de comparer ensuite la part de ces modes de déplacement en termes de nombre de déplacements, de kilomètres parcourus, d’énergie consommée et de GES émis. Ainsi, le train représente 12% si l’on considère la distance parcourue, mais sa part se réduit à 2% en termes d’énergie consommée et à moins de 1% des GES émis. En conclusion, le train constitue un mode de déplacement efficace et écologique, à privilégier dans les axes de travail.
Les voyages de longue distance reposent à 90% sur des modes de transport carbonés (voiture, avion) et émettent 41 MtCO2 par an.
Extrait du rapport « Voyager bas carbone »
Si le focus concernait ici la mobilité longue distance, d’autres postes d’émission de GES touchent le secteur du tourisme : la mobilité courte distance, la nourriture, les achats…
Pour en savoir plus et envisager le sujet dans sa globalité, téléchargez le rapport « Voyager bas carbone » publié par The Shift Project.
Béatrice Jarrige présente ensuite quelques grands leviers de transformation de la mobilité longue distance permettant d’atteindre une situation plus résiliente en 2050, respectant la limite des 2 tonnes de CO2 par Français par an :
- Réinvestir dans le voyage en train avec pour objectif de tripler le voyage touristique ferroviaire d’ici 2050,
- Décarboner les voyages professionnels,
- Repenser le voyage à l’autre bout du monde,
- Développer une offre touristique pour un voyage résilient,
- Mettre en place une gouvernance énergie-climat du tourisme,
- Déployer la voiture électrique,
- Associer technologie et sobriété d’usage pour l’avion.
Retrouvez les travaux complets de The Shift Project et notamment le focus sur la mobilité longue distance dans le cadre du Plan de transformation de l’économie française (PTEF), ici : https://theshiftproject.org/plan-de-transformation-de-leconomie-francaise-mobilite-longue-distance/
Le tourisme de proximité avec « Partir Ici » en Auvergne-Rhône-Alpes
Marie Sturm, chargée de projets chez Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme nous a proposé un témoignage concret sur l’enjeu de la mobilité en présentant l’une des actions phares de la Région à destination des visiteurs de proximité. La démarche « Partir Ici, votre guide pour mieux voyager près de chez vous » est née de la crise du COVID_19 et incarne la vision de tourisme bienveillant portée par la Région. Elle se matérialise aujourd’hui à travers une Web application « Partir Ici » développée par l’Agence Régionale du Tourisme Auvergne-Rhône-Alpes (ART), à destination des habitants et visiteurs en voyage dans la région. Notons que la clientèle intrarégionale représente 30% des visiteurs d’Auvergne-Rhône-Alpes, une bonne raison de s’adresser spécifiquement à eux.
La démarche « Partir ici » a été construite avec les locaux : offices de tourisme, influenceurs locaux, habitants, professionnels… Concrètement, les offres sélectionnées par les offices de tourisme doivent répondre à un cahier des charges : original, hors des sentiers battus, incitation à la rencontre avec les acteurs, valorisation du patrimoine… Un autodiagnostic de 45 questions permet de s’assurer que les offres respectent les critères sociaux, économiques et environnementaux. On trouve en ligne des idées de sorties outdoor et culturelles, des offres et des envies, des expériences partagées par les ambassadeurs…
Pour l’animation et la diffusion de la démarche, la Région s’appuie sur une communauté d’ambassadeurs, appelés « éclaireurs », qui vont tester ces offres, les vivre et les partager via des articles, des stories, des vidéos… Ces « micro-influenceurs » sont la plupart du temps déjà bien actifs dans leurs sphères d’influence. La communauté est aujourd’hui composée de 90 éclaireurs qui sont recrutés par les offices de tourisme, une complémentarité intéressante entre l’institutionnel et l’habitant. En complément l’ART a mis en place des challenges pour mobiliser les territoires et les offices de tourisme.
Découvrez l’application Partir ici.
