« Le tourisme de demain : résilient, bienveillant et bas carbone »
« Une participation à la restauration de la biodiversité »
« Un tourisme qui contribue à la lutte contre les changements climatiques »
« Un outil pour faire évoluer durablement les mentalités »

Tourisme et croissance abordés lors de l’événement Sharing for the Future

Sharing for the Future : croissance et tourisme

Une table ronde qui met en perspective tourisme et croissance lors de l’événement Sharing for the Future

Le vendredi 20 janvier 2023 s’est déroulée à Grenoble la troisième édition de l’événement Sharing for the future, organisée par le Master SEST (Stratégies Economiques du Sport et du Tourisme de l’Université Grenoble Alpes) en partenariat avec le Cluster Montagne. Cette année, cette journée d’échanges était placée sous le signe de la sobriété ! Lors de trois tables rondes, des acteurs du sport, du tourisme et de l’événementiel se sont interrogés sur les stratégies d’adaptation à adopter face aux enjeux de sobriété énergétique auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui :

 

Tourisme : la croissance à tout prix ?

Les intervenants de la troisième table ronde se sont questionnés sur le lien entre tourisme et croissance, à l’heure où les défis climatiques, sociétaux, sanitaires… remettent en question le modèle économique actuel de l’industrie du tourisme et invitent à de nouveaux changements, notamment par le recours à plus de sobriété. Trois points de vue se succèdent au cours de cette table ronde : Dominique Kreziak (enseignante-chercheuse en sciences de gestion et directrice de la chaire Tourisme Durable à l’Université Savoie Mont Blanc), Cyril Laïly (Directeur de l’Agence Grenoble Alpes) et Elodie Salvi (responsable du site touristique des Caves de la Chartreuse) avant de laisser la place aux échanges avec le public.

 

Tendance de consommation : la sobriété choisie

Dominique Kreziak expose d’abord sa vision universitaire de ce phénomène de sobriété – un phénomène montant dans la consommation en générale mais également dans les pratiques touristiques – mais en l’envisageant du point de vue d’une sobriété/frugalité choisie. On observe de plus en plus de comportements tendant à consommer « moins mais mieux » (étude Obsoco, 2018) motivés par une volonté de simplicité porteuse de sens afin de mieux se réapproprier sa consommation. Ces pratiques de sobriété choisie sont néanmoins le reflet de marqueurs sociaux car elles se manifestent davantage au sein des classes sociales possédant un capital culturel relativement élevé. Il s’agit ici de consommateurs qui font le choix de se détacher volontairement de leurs possessions matérielles, et non pas pour des raisons financières. L’industrie du tourisme n’échappe pas à cette tendance de sobriété avec des clientèles en recherche de nature, de tourisme de proximité, d’expériences signifiantes mais simples (micro-aventure, van life, nuitée en refuge…). Les propos de la chercheuse sont illustrés par deux projets de recherche en cours :

  1. une recherche sur les bivouacs de moyenne montagne dont la croissance est exponentielle (ce qui témoigne bien de cette volonté marquée de minimalisme) et qui génère sur les territoires concernés des conflits d’usage ou un impact sur la biodiversité. Cette recherche consiste à réfléchir à d’autres modèles économiques pour répondre à cette nouvelle tendance de la simplicité : aménager plus ? aménager moins ? aménager différemment ?
  2. une recherche, menée par notre collaboratrice et doctorante Ilse de Klijn, qui s’attache aux pratiques de frugalité des randonneurs de St Jacques de Compostelle. Ses résultats démontrent qu’au-delà d’une transformation existentielle liée à cette expérience touristique, de véritables pratiques de frugalité se mettent en place dans le quotidien de ces randonneurs à l’issue de l’expérience (tri des affaires, dépouillement des objets…). On reconnaît alors le caractère transformatif du tourisme, à travers cette expérimentation de la frugalité vécue en vacances qui se poursuit au retour chez soi.

L’industrie du tourisme n’échappe pas à cette tendance de sobriété

Grenoble Alpes, Capitale Verte Européenne

Cyril Laïly apporte ensuite sa vision territoriale en abordant le cas de Grenoble Alpes. Grenoble Alpes est une terre urbaine et accessible mais également dotée d’une forte culture montagne car traversée par plusieurs massifs montagneux (Vercors, Belledonne, Chartreuse). Ce territoire a également obtenu en 2022 le titre de Capitale Verte Européenne pour l’exemplarité de ses actions en matière de développement durable. En tant que territoire multiple se pose alors la question de comment offrir à Grenoble Alpes un positionnement touristique qui ait du sens ? La réponse est simple : il faut calmer le jeu, arrêter de se penser comme la capitale de la microaventure qui réduirait le territoire à un camp de base, un terrain de jeu extérieur sans sens commun ni qualité éducative. Grenoble Alpes a alors élaboré une stratégie touristique basée sur quatre axes :

  1. Inspirer – en incarnant et en assumant d’être un territoire qui transpire l’art de vivre de la montagne. Ceci exige de développer des actions d’éducation à l’environnement, de penser les mobilités comme des leviers d’attractivité ou encore de développer des labels comme Clef Verte ou Accueil Vélo ainsi que de nouvelles formes d’hébergements expérientiels ;
  2. Faire connaître – une action de communication promouvant les valeurs environnementales du territoire et facilitant l’accès à la montagne (mobilités douces) et l’augmentation du nombre de nuitées pour lutter contre le fort excursionnisme qui n’apporte pas de bienfaits ni environnementaux ni économiques au territoire ;
  3. Faire aimer – qui passe par une appropriation de la culture montagne à travers des événements par exemple ;
  4. Faire venir – des actions fortes sur la mobilité pour encourager un accès zéro-carbone aux sites touristiques du territoire.

 

Une croissance raisonnée pour les Caves de Chartreuse

Elodie Salvi livre enfin la vision du site touristique des caves de la Chartreuse qui a entrepris des actions engageantes dans le but de garantir une croissance volontairement raisonnée. Ce site touristique et muséographique est indépendant du site de production qui ne se visite pas et s’inscrit dans le mouvement spiritourisme né en Ecosse. C’est un marché d’environ 2 millions de touristes par an en France. Le tourisme aux caves de la Chartreuse a sensiblement évolué depuis ses débuts en 1968 alors que les visites étaient libres et gratuites et les accueils de visiteurs assez conséquents saturant régulièrement la fréquentation du site.

En 2020, le site a été réhabilité suite à 18 mois de travaux et le modèle touristique a été totalement repensé pour favoriser davantage de partage et de qualité : plus de visites libres mais des visites guidées uniquement, des groupes composés de 19 personnes maximum, le dépôt du téléphone portable à l’entrée avant la visite pour mieux vivre le moment mais aussi pour éviter une diffusion non contrôlée de contenus sur les réseaux sociaux qui pourrait générer une surfréquentation, fin des emplacements de stationnement des bus, végétalisation massive des espaces extérieurs notamment par des arbres capables de capter les émissions carbones des véhicules, incitation à venir en train puis bus jusqu’au site pour les visiteurs et à covoiturer ou venir en vélo pour les salariés…

En termes de communication, le mot d’ordre est de communiquer très peu, voire pas du tout…

En termes de communication, le mot d’ordre est de communiquer très peu, voire pas du tout, avec une absence des réseaux sociaux digitaux en capitalisant davantage sur le réseau social humain ! Ce site touristique emblématique se veut aujourd’hui discret pour favoriser une expérience de qualité, mais aussi engagé pour limiter au maximum ses impacts sur l’environnement.

Une série de questions-réponses avec le public

La parole est ensuite laissée au public qui s’est saisi de ce temps pour poser les questions suivantes. Chaque intervenant s’est prononcé sur les différentes questions, dont les réponses peuvent être visionnées dans le replay de la table ronde.

  • Quel est votre point de vue par rapport à d’autres territoires qui continuent d’adopter un développement assez classique en termes de communication, de projets de croissance ? (25’25)
  • Quels indicateurs qualitatifs pourrait-on imaginer aujourd’hui pour mieux mesurer la qualité d’accueil et la satisfaction client par opposition à des indicateurs quantitatifs classiques (fréquentation, chiffre d’affaires…) ? (30’22)
  • Malgré les efforts engagés aujourd’hui pour développer les réseaux de tram, bus et autres, comment inciter les visiteurs à utiliser les transports en commun pour se rendre sur des sites touristiques plutôt que de favoriser l’usage de la voiture individuelle ? (32’00)
  • Cherchez-vous plutôt une croissance liée à un nouveau type de public ou bien une non-croissance ? (37’43)
  • Face aux néo-touristes qui fréquentent la montagne et se mettent en danger, notamment depuis le Covid-19, n’y a-t ’il pas une éducation des touristes à repenser ? (43’03)
  • Comment sont pensées les mobilités pour les habitants en périphérie de la ville de Grenoble qui expérimentent des difficultés pour entrer et circuler dans Grenoble ? (46’28)
  • Sommes-nous vraiment sortis de la quête de « croissance à tout prix » dans l’industrie du tourisme ou bien vos initiatives sont-elles des exceptions ? (50’35)
  • La question n’est-elle pas d’accepter de renoncer à la croissance et de travailler plutôt à périmètre constant, et de passer ainsi du volume au qualitatif ? (57’15)
  • L’issue à tous les problèmes évoqués ne résiderait-elle pas dans la qualité, notamment en misant sur le patrimoine vivant et les habitants des territoires ? (01’01’58)
  • Envisager la décroissance revient nécessairement à arbitrer le fait d’accueillir moins de monde, comment sélectionne-t-on alors équitablement les clientèles que l’on souhaite accueillir ? (01’06’25)
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