Olivier Bessy, professeur d’Université et directeur du master tourisme de l’Université de Pau et des pays de l’Adour, considère la transition touristique comme un élément structurant de ses recherches. Il nous en parle dans son récent article publié dans The Conversation, une plateforme dont le but est de diffuser au grand public des connaissances universitaires.
Sans surprise, le bilan touristique de l’année 2020 est sans comparaison avec les années précédentes. On parlerait même de la crise la plus grave de l’histoire du tourisme tant la pandémie mondiale de la Covid-19 et les confinements successifs ont bousculé tout ce qu’on pensait acquis. En France, les recettes touristiques annuelles approchent 170 milliards d’euros en « année normale ». Atout France estime une baisse de ces recettes d’environ 50 à 60 milliards d’euros, correspondant à une diminution de 30 à 35% de la consommation touristique annuelle. L’effort financier considérable apporté par l’Etat et les campagnes de communication incitant à visiter la France ont sauvé une partie de l’activité touristique estivale, mais les effets restent limités avec notamment de fortes disparités selon les territoires. Si les destinations du littoral, de la montagne et de la campagne tirent leur épingle du jeu, la donne n’est pas la même pour les destinations urbaines, la Corse ou les DOM-TOM. Rien ne semblait pouvoir arrêter l’hyper expansion du développement touristique à l’échelle internationale, sauf visiblement cette crise sanitaire non anticipée.
La remise en question de ce modèle « économique productiviste standardisé » qu’était l’industrie touristique jusqu’à aujourd’hui apparait alors comme inévitable. On le dit, et on le répète, mais ne serait-ce pas le moment « rêvé » de saisir cette opportunité de réinventer le tourisme de demain ?
Olivier Bessy nous dresse quelques perspectives pour repenser notre modèle de développement touristique :
- Favoriser une approche qualitative plutôt que quantitative en se détachant des indicateurs macro-économiques de fréquentation des territoires.
- Switcher du paradigme du « technocentrisme » vers « l’éco-humanisme » et entrer dans l’ère de la transmodernité touristique. Les mutations politiques, économiques, socioculturelles, environnementales et technologiques que nous vivons en ce moment remettent en cause les modèles établis. On reconnait aujourd’hui la nécessité de trouver du sens, de construire un nouveau rapport au monde. Cela se traduit par une volonté de privilégier la qualité de vie, changer son rapport au temps, se nourrir de la richesse des expériences vécues, se reconnecter à soi, aux autres et aux lieux ; ce que le tourisme permet.
- Réguler davantage la logique économique mondialisée du toujours plus, qui ne disparaitra malgré tout pas du jour au lendemain.
- Promouvoir une approche territoriale transversale dont la responsabilité incombe aux acteurs publics.
- Généraliser un tourisme responsable qui privilégie une approche territoriale singulière, inclusive et innovante.
On le sait, le défi est de taille dans le monde incertain de demain, mais toute piste nouvelle est bonne à prendre. Et n’oublions pas que l’effort collectif participera à la réussite de la transition touristique.
Pour aller plus loin :
- La Covid-19, ou comment un choc planétaire permet de mieux lutter contre le surtourisme, 28 décembre 2020, The Conversation
- Tourisme et pandémie en Europe : les campagnes de pub se réinventent, 3 décembre 2020, The Conversation
- Le tourisme post-Covid sera-t-il virtuel ?, 14 janvier 2021, The Conversation