Train de nuit : retour sur une vieille idée qui redevient moderne

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Longtemps relégué au rang des souvenirs ferroviaires, le train de nuit revient sur le devant de la scène. Porté par les enjeux climatiques et le besoin d’une mobilité plus durable, il se réinvente pour séduire voyageurs et collectivités. Mais pourquoi ce renouveau, après des décennies de déclin ?

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©Masucil.com

Enquête

Les origines du voyage endormi

Notre investigation nous ramène aux années 1850, à l’époque où le train de nuit fait ses premiers pas. L’idée, simple mais ingénieuse, séduit rapidement : voyager pendant son sommeil pour gagner du temps. Pendant plus d’un siècle, il incarne une promesse d’efficacité et de confort, un mode de transport incontournable pour qui veut optimiser son trajet sans sacrifier sa nuit.

Voyage en train de nuit - mobilité douce
©Trainconsultant.com
Quand la lumière s’éteint

À partir des années 1980, le rêve ferroviaire vacille. L’arrivée du TGV, la démocratisation de l’avion et la baisse des investissements dans les lignes secondaires changent la donne. Le train de nuit devient une option jugée vieillissante, lente et parfois inconfortable. En 2017, il ne reste plus que deux lignes en France – Paris–Briançon et Paris–Rodez (via Albi et Toulouse) – avec un taux d’occupation moyen de 47 %.
Bilan du marché du transport ferroviaire de voyageurs 2018 via la newsletter du Shift Project (2024, semaine 12)

Ce retrait soulève alors une question sensible : celle du financement public. Or, les chiffres racontent une autre histoire. Une étude relayée par The Shift Project démontre que les subventions consacrées aux trains de nuit ne sont pas supérieures à celles accordées aux petits aéroports déficitaires, pour un impact carbone pourtant radicalement différent. Sur un trajet de 500 km, un TGV émet en moyenne 1,5 kg de CO₂, un Intercité de nuit 4,5 kg, contre 115 kg pour un avion.

 

Le grand retour sur les rails

Depuis 2020, le vent tourne. Avec le plan France Relance, l’État parie à nouveau sur la mobilité ferroviaire et relance plusieurs lignes. Paris–Nice et Paris–Tarbes–Lourdes reprennent du service en 2021, suivis par Paris–Aurillac en 2023. À l’international, des coopérations européennes permettent d’ouvrir des liaisons comme Paris–Vienne (2021) et Paris–Berlin (2023).

Ce renouveau ne se limite pas à une réactivation symbolique : les voitures sont rénovées, des espaces sanitaires sont installés dans certaines gares, et le confort des cabines évolue. L’image nostalgique cède la place à une ambition claire : faire du train de nuit une alternative crédible et moderne.

Pourquoi miser sur le train de nuit ?
Voyage en train de nuit - mobilité douce - carte des trains de nuit
©Touteleurope.eu

Les arguments en sa faveur sont solides. Sur le plan environnemental, son empreinte carbone est imbattable pour des distances moyennes. Sur le plan pratique, il offre un gain de temps non négligeable : voyager en dormant, éviter la fatigue de la route, économiser une nuit d’hôtel et profiter de départs et arrivées en centre-ville. Enfin, pour les collectivités, c’est un levier stratégique pour reconnecter des territoires délaissés par le TGV.

Mais l’idylle n’est pas sans nuages. Les wagons Corail, parfois âgés de quarante ans, nécessitent des investissements lourds pour répondre aux attentes actuelles. L’organisation du trafic doit aussi s’adapter, car la nuit reste le moment privilégié pour les travaux sur les voies. Et, au-delà de la technique, un enjeu d’image persiste : comment convaincre que ce mode de transport n’est pas un vestige du passé, mais une expérience confortable et moderne ?

Ces questions montrent que la relance du train de nuit ne se joue pas uniquement sur les rails : elle engage autant l’imaginaire collectif que les choix budgétaires.

Prochain chapitre : de la théorie à la pratique. Nous avons testé le Paris–Ariège. La promesse tient-elle ses engagements ? Réponse dans notre reportage.

 

Récit de voyage original Paris-Ariège

Vous hésitez encore à prendre le train de nuit ? Expérimentation faite, avec un objectif simple : arriver reposé·e, tout en réduisant l’empreinte carbone.
Spoiler : c’est validé. Même si, comme toujours, deux ou trois détails sont à anticiper.

Pourquoi dire oui

Traverser la France en voiture pour une seule réunion et un rapide arpentage ? Peu convaincant. Deux journées de travail sacrifiées, une dose de fatigue, des risques d’accident… Rien de très engageant.
Le train de nuit cochait toutes les cases : un gain de temps, un tarif accessible, et un mode de déplacement cohérent avec une démarche de mobilité durable. Difficile de refuser — à condition de bénéficier d’un minimum de confort (le suspense reste entier).

Ce qu’il faut retenir côté positif

La couchette, d’abord.

voyage en train de nuit - mobilité douce - la couchette
©Mollow

Pas de tentative sur les places assises (peut-être envisageable pour les très endurants ou pour les très grands qui ne rentreraient pas dans les couchettes). Quelques euros de plus offrent une vraie nuit de sommeil. Et elle a eu lieu.
Petit bonus : la SNCF prévoit un kit de bienvenue (masque, boules quies, oreiller, couette été/hiver). Simple, mais efficace.

L’ambiance a également son charme. Dès la gare, les voyageurs se reconnaissent à leurs sacs à dos. Échanges spontanés sur les randonnées, les bons plans, les horaires…
Dans le train, les habitués sortent discrètement leur trousse d’essentiels : brosse à dents, chargeur, vêtements de rechange. Une habitude bien utile pour éviter de fouiller sa valise dans le couloir étroit (astuce à retenir).
Les échanges entre voisins restent discrets, mais cordiaux – parfois pour s’excuser d’une chaussette tombée par mégarde, souvent par simple curiosité.

Enfin, l’option « espace dame seule », gratuite sur simple demande, ajoute une vraie plus-value en matière de tranquillité et de sécurité pour les femmes voyageant seules.

Ce qui pourrait être mieux

Pas de douche.
Parfois, les espaces de première classe permettent l’accès à une salle d’eau dans certaines gares à l’arrivée. À considérer, d’autant que le passage de cabines 6 à 4 personnes offre un confort supplémentaire.
En seconde classe, seul un petit espace lavabo est proposé. Propre et fonctionnel, mais exigu. Lavabo très bas, robinet au débit timide : suffisant pour un rafraîchissement rapide, pas plus.

Verdict

Envie de repartir.
En contexte professionnel, la première classe pourrait valoir le détour pour arriver plus frais.
Côté personnel, le retour est déjà envisagé – cette fois en tant que touriste, direction Ariège. Et pourquoi pas explorer d’autres destinations accessibles de nuit ?
Après tout, la vraie destination… c’est peut-être le trajet lui-même.
Et il reste encore des services à tester. Le snacking, par exemple. Ou le petit-déjeuner, livré directement à la couchette sur réservation. Pour une prochaine fois.

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